Après 45 ans de carrière, le groupe reste à son apogée
Quels groupes peuvent se tarder de garder le haut du pavé après tout ce temps et de cette façon ? Judas Priest ne se repose pas sur des sorties best-of ou raretés remastérisées pour avoir la bonne occasion de partir en tournée. Non, Judas Priest propose toujours de nouveaux albums d’une très grande qualité comme ce fût encore le cas encore avec Firepower, sorti en 2018. Naturellement, qui dit album, dit tournée ! Ainsi, le groupe a lancé sa tournée européenne ce soir à Paris, après une tournée en Asie, USA et Amérique du Sud.
La soirée a été ouverte par Disconnected, un très récent groupe Français venu défendre son 1er album sorti en mars dernier. Heureux d’être là et conscient de leur chance, Disconnected livrera une bonne performance bien que trop de blabla entre les titres et un surplus de stéréotypes lié au style. Le groupe dit tirer ses influences de Gojira, Alter Bridge ou Deftones, composant un Metal « moderne ». Personnellement, je n’ai rien entendu de révolutionnaire, mais il est toujours bon de pouvoir soutenir une scène locale qui tient la route et qui n’est pas tant que ça déconnectée du genre.
Heureusement que je suis à l’heure car Judas Priest est annoncé pour 20h et en effet, la politesse Anglaise fait qu’il ne seront pas en retard ! Fraîchement surclassée en cat 1 suite à un couac de placement (initialement en cat 3), la tension monte d’un cran dans la fosse qui, contrairement au plus haut des gradins, est pleine. L’intro de War Pig de Black Sabbath annonce l’arrivée imminente du groupe qui apparaîtra derrière un drap sur Firepower marquant le début d’1h40 sans faux pas ! A 67 ans, Rob Halford, bien que moins mobile que dans sa jeunesse, parcours la scène de droite à gauche et marque une belle complicité avec Richie. Ce soir, pas de pantalon noir transparent mais une tenue couleur alu de haut en bas, avec quelques changements de vestes au cours de la soirée et l’ajout d’accessoires comme une épée lumineuse et bien évidemment, son éternelle moto ouvrant Hell Bent For Leather.

On saluera la déco de scène qui, pour une fois, est plus élaborée que de simples draps reprenant les covers des albums. Le groupe a investi dans un très bel grand écran LED où étaient diffusés des films mêlés à des images de synthèse dans le style de Firepower. On sera plongé dans le quartier de Whitechapel avec Jack l’éventreur dit The Ripper, ou dans la révolte britannique sur Breaking The Law. On voudra marcher comme une horde de robots à l’instar de Rob Halford qui se prêtera au jeu sur Metal Gods. La scène, surplombée par Scott Travis à la batterie, est ornée de plusieurs tridents et de piliers d’où jaillira à plusieurs reprises de la fumée et spots lumineux, chevauchés par Richie et Andy.

On aurait pu s’inquiéter de voir un cover-band mené par Rob Halford avec l’absence de Glenn Tipton sur cette tournée, atteint de Parkinson (reste membre à part entière et fait des apparitions sur scène lorsque sa santé le permet), remplacé par Andy Sneap, le producteur de Firepower. Cette dernière s’ajoutant au départ de K.K Downing en 2011 succédé par Richie Faulkner, pouvait laisser présager qu’un groupe sans ses 2 guitaristes historiques ne retrouverait pas sa grandeur. Par chance, Richie a su éclipser K.K et a réussi à donner un réel coup de pied au groupe qui a renoué avec un son qui a fait sa splendeur; et Andy Sneap, bien que sa présence scénique soit inexistante, assure parfaitement le job. Le groupe rendra hommage à Glenn Tipton pendant le soli d’Electric Eye en diffusant des images de lui en noir et blanc. A l’inverse, aucune allusion à Dave Holland décédé l’année dernière et qui fut leur batteur pendant une dizaine d’années (condamné à la prison pour agression sexuelle sur mineur handicapé mental…) ou à KK Downing qui a récemment avoué que si on lui proposait de revenir, il n’y réfléchirait pas trop longtemps.

La soirée bat son plein, les riffs sont énormes, musicalement tout est parfait, la batterie vous résonne de l’intérieur, la basse de Ian Hill est calibrée et les lignes de guitares toujours aussi carrées, envoient des riffs véloces et incisifs comme on les aime chez Judas. La fosse est déchaînée à l’inverse des gradins mais il y a un gros problème de voix. Ce dernier ne semblait pas venir de Rob Halford qui était en forme, mais plutôt de la balance son. C’est frustrant car venir à un concert de Judas Priest et ne pas entendre Le Metal God, c’est un peu comme aller à la pêche sans canne : ça n’empêche pas de profiter du paysage, mais on ne peut pas vraiment participer à l’activité. Autre petit bémol, la setlist. Difficile, je sais, après tous ces albums incroyables, d’en sortir une setlist qui plairait à tous mais bordel, pourquoi qu’un titre de Painkiller, aucun de Redeemer of Souls et toujours aucun de Ram It Down ? Evidemment, et au grand damn de Tim Owens Ripper qui s’est récemment exprimé à ce sujet, aucun titre de Jugulator et Demolition joués sur cette tournée (ni les autres) mais bon, soyons honnêtes, on s’en passe ! Tout comme je me passerais de Green Manalishi qui est très souvent interprétée mais qui n’apporte rien. Ok, c’est une reprise de Fleetwood Mac, groupe que j’admire bien que la période Peter Green ne soit pas ma préférée, mais Judas a tellement de titres que faire une reprise sur scène n’est pas indispensable. Par contre, quelle belle surprise d’avoir eu Killing Machine pas jouée depuis 1978 !

1h40 à ce rythme, on est rincés, mais j’aurais aimé que les titres Breaking The Law et Screaming For Vengeance soient un peu plus longs dans des versions d’échanges avec le public comme ils pouvaient le faire auparavant. Les titres ont tous été plus ou moins bâclés, mais on ne peut pas tout avoir, soit on étire et on a une setlist raccourcie, soit on enchaîne et on offre plus de 20 titres au public. Public d’ailleurs qui se renouvelle de plus en plus avec un mix des générations que je ne voyais pas il y a une petite dizaine d’années. De nombreux enfants d’environ 8-10 ans sont présents avec leur casque sur les oreilles, la preuve que la musique de Judas Priest est immuable.

Judas Priest a livré une très belle performance bien que la voix n’ait pas pu être mise en avant. Le feu, les clous, le cuir, les lunettes Aviator, la moto, la puissance musicale, tout y était. Firepower offre des pépites comme No Surrender qui se fondent sans problème au reste de la discographie, permettant au groupe d’asseoir son statut de légende encore en activité. Le concert se termina sur Living After Midnight dans une ambiance incroyable avec un public debout aux visages rayonnants.
Comme ils le disent, « The Priest will be back » et il faudra compter sur nous !
PS : merci aux adorables Metalleux d’avoir ramenés nos effets personnels égarés lors de notre transfert de places au comptoir des « objets perdus » !
Setlist :
- Firepower
- Running Wild
- Grinder
- Sinner
- The Ripper
- Lightning Strike
- Desert Plains
- No Surrender
- Turbo Lover
- Killing Machine (first live performance since November 24, 1978)
- The Green Manalishi (With the Two Prong Crown)(Fleetwood Mac cover)
- Night Comes Down
- Guardians
- Rising From Ruins
- Freewheel Burning
- You’ve Got Another Thing Comin’
- Hell Bent for Leather
- Painkiller
- The Hellion/Electric Eye
- Metal Gods
- Breaking the Law
- Living After Midnight
