Ôde à tous les devotees, ou autres passionnés
Hier soir, mon téléphone s’est emballé avec comme mot d’ordre « Depeche Mode ». N’ayant pas vraiment le temps de lire les messages Messenger, Whatsapp ou SMS, je me suis empressée de m’inventer un monde à savoir :
- 1 – le groupe sort un nouvel album
- 2 – le groupe annonce une tournée
- 3 – Alan Wilder est bien en studio avec le trio
Une fois rentrée, une douche froide, un sursaut du cœur, une sueur, la nouvelle était tout autre, et bien plus triste : Andy Fletch Fletcher nous a quitté.
Je dis NOUS ce soir car le fan est avant tout un être égoïste, dévoué mais un brin égoïste. Comment ça, Fletch est décédé ? Mon premier instinct de fan est de réfuter la nouvelle, puis vient le déferlement d’émotions avant l’égoïsme pur : « mais que va devenir Depeche Mode ? » Ne mentez pas, cette question est sur toutes nos lèvres tandis que toutes nos larmes pleurent Andy, le ciment, du groupe.
Ce soir je suis confrontée pour la première fois à la mort d’une idole. Pas celle de mes parents, pas celle des médias, juste mon idole qui a ce titre, du fait de faire partie de mon groupe à part entière : Depeche Mode.
Sa mort annoncée, j’ai essayé de ne rien laisser paraitre lors d’un diner, tiraillée entre mes deux cerveaux, amplis de mots, de maux : « qu’est-ce que ça peut bien te foutre, tu ne le connaissais pas ? » certainement ce que pense la majeure partie des gens qui m’entourent … de loin, et le « Comment ça, Fletch est décédé ? Qu’est-ce que cela signifie ? ». La frustration de ne pas pouvoir partager ma peine pour une personne que je n’ai jamais pu rencontrer et donc encore moins connaitre mais qui m’a pourtant, via sa musique, accompagnée à chaque instant de ma vie. L’envie de pleurer, seule, sans jugement, et d’aller vers ma 2e famille, celle des Devotee, tout aussi bouleversée que moi et qui comprend ma peine, mon chagrin.
La mort d’une idole, oui et non, bien sur, on ne parle pas de Dave Gahan ou de Martin Gore, mais de Fletch, me diraient d’autres personnes. Mais Fletch, c’est Depeche Mode, son ADN. Mon égoïsme de fan qui pense d’abord à l’avenir avant tout du groupe, a laissé de côté la tragédie de la perte de l’homme, un instant, un homme de 60 ans qui m’a tellement apporté à travers ce groupe.
Ce soir je pleure une idole mais surtout un groupe, non pas que je les croyais éternels mais pour qui je rêvais d’amener mon conjoint et mes ou mon futur enfant les voir sur scène. Ce soir je pleure une partie de ma vie avec qui Fletch s’en est allé. Il n’est pas une chanson de Depeche Mode sans un souvenir de ma vie, Depeche Mode soigne les maux, les plaies et m’a ouvert à une famille inconditionnelle de devotees. Des personnes passionnées, dévouées, torturées mais toujours présentes, même dans l’absence, cette famille sommeille dans l’ombre et renait à chaque lumière, sombre ou claire. Ce soir je souhaite dédier ces mots à cette famille, à mes ami·es, au groupe et aux proches d’Andy car nous savons la pureté et la richesse de l’homme dans l’œuvre de Depeche Mode et dans l’Histoire.
Hier soir j’ai perdu une idole et je m’en suis rendue compte ce matin, lorsque Black Celebration a retenti : cette sensation indescriptible d’écouter un titre qui n’aura plus jamais la même saveur, que ce soit ce titre ou tous les autres, ce matin j’ai écouté pour la première fois un autre Depeche Mode et mon cœur en a été retourné. Un son révolu, une époque définitivement autre et sans retour en arrière possible, un son d’un lendemain que je ne pensais pas entendre si tôt. Les écouter aujourd’hui n’a plus le même sens qu’hier, à 12h, lorsque résonnait encore l’innocence des notes de claviers sur Photographic.
Alors oui, j’ai des souvenirs, et me dit-on, j’ai eu la chance de les vivre, voir ce Fletch flegmatique, cynique mais drôle, à qui on doit tellement dans la longévité du groupe, à qui on doit nos fous rires comme nos chairs de poule, à qui on doit ce groupe incommensurable de ces 40 dernières années, à qui on doit une partie de notre vie. Mais demain ne sera plus Depeche Mode comme on le connait et on ne peut s’assurer de pouvoir parler d’un Depeche Mode au présent. Seul Dave et Martin pourront décider, au-delà de notre égoïsme de Devotee.
Ce soir nous pleurons, mais nous allons danser sur Everything Counts, Never Let Me down, Personal Jesus, Enjoy The Silence, Suffer Well, Behind The Wheel, parce que du haut de tes synthés, Fletch, tu continueras d’être l’écho de nos maux.
Goodbye…
Et l’une de ses dernières apparitions en 2020, pour l’intronisation du groupe au Rock N Roll Hall Of Fame, et comme d’habitude, toujours le mot pour rire quand Dave explique qu’il ne sait pas ce qu’il aurait fait sans eux et la musique et que Fletch répond « tu serais certainement encore en train de voler des voitures Dave ».
Et une ITW récente pour Rolling Stone avec comme question « on dit souvent de toi que tu es l’arbitre dans le groupe »
Comment vivre un concert sans le sempiternel « Andrew Fletch…Fletcher !!!!! » prononcé par Dave Gahan :
Je suis encore un peu dans le déni. Pas la force d’écouter dm, encore sous le choc. Comme tu l’exprime je me sens seule avec cette peine d’avoir perdu quelqu’un que je ne connais pas, mais surtout de tourner la page d’une époque. A mon sens dm est fini, ça faisait déjà un moment musicalement mais bon là je ne vois pas d’avenir au duo. Ça m’a fait du bien de lire ton article.
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