Quelle soirée remplie d’émotions…Un violoniste, la danseuse étoile Marie-Agnes Gillot, et Marianne
Enfin, je retrouve Marianne Faithfull sur scène après l’annulation, en avril dernier de sa tournée, suite à une chute et à une fracture du sacrum. Mais Marianne tenait à repousser simplement l’échéance de remonter sur scène, et pas seulement à annuler (comme certains…genre Black Keys ? Ahum).
Dois-je encore présenter cette immense dame ? Connue pour certain(e)s comme la compagne de longue date de Mick Jagger, maîtresse de Keith Richards (elle a d’ailleurs le même rire que lui, c’est troublant, comme quoi, une histoire de chaussettes ça peut rapprocher bien plus qu’on ne le pense*) ou comme la fille d’une aristo Autrichienne et d’un père espion britannique (et arrière petite nièce de l’écrivain Leopold von Sacher-Masoch) ou encore comme actrice pour JL Godard ou comme véritable droguée interdit de chanter Sister Morphine ou comme compositrice et chanteuse depuis les 60’s.
Oui Marianne, du haut de ses presque 69 ans, a eu des centaines de vies différentes : frôlant la mort à plusieurs reprises, ressuscitant des limbes les plus sombres, côtoyant un panel de petits amis plus fous les uns que les autres, abusant de toutes les substances…Mais bourrée de talents !
Elle compose une majorité de ses titres, et a participé également à plusieurs tubes des Rolling Stones. Certes, en plus de tout ça, plusieurs grands noms se pressent à sa porte pour lui offrir leurs compositions (rien que sur son dernier album : Nick Cave, PJ Harvey, Anna Calvi, Roger Waters, Ed Harcourt, TomMcRae, Leonard Cohen, Brian Eno).
Me voilà donc au Trianon pour la première fois. Un très beau théâtre parisien dans le quartier Montmartre, avec 2 balcons et un orchestre. La salle était overbooked, des rangées de chaises ont même été ajoutées. J’avais rendez-vous pour revendre un second billet, super rencontre avec Monique, 72 ans, fan de la première heure qui a pu avoir la chance de l’entendre sur scène dans les 70’S.

Une première partie du nom de Gabby Young est arrivée à 20h pile poil et a joué 25′. France Inter en avait fait une éloge mais finalement, je n’ai pas été plus emballée que ça. Ils sont 2 sur scène, une chanteuse qui a la même voix que Shirley de Shirley et Dino, jouant de la trompette en plastique et de la gratouille. Certes, elle a une très jolie voix mais ça manquait de punchy. C’était sympa, mais sans plus (A.Manoukian, si tu lis ça, tu vas frôler la crise cardiaque, je prendrai donc le temps de me pencher sur leurs 2 albums pour me faire une vérifiable idée de leur talent).

20h40, la salle s’éteint. La scène est occupée par une batterie, 2 guitares, un violon, un pupitre, un fauteuil et des tasses de thé.
C’est la 4e fois que je vois Marianne, et à chaque fois c’est différent. En 2011, je l’ai vue à Tours avec la base : basse, guitare batterie (ICI pour les photos), puis quelques mois après à Combs La Ville (ICI pour les photos) uniquement accompagnée d’un guitariste acoustique, puis en 2013 accompagnée uniquement d’un guitariste et d’une contrebasse (ICI pour les photos). Ce soir, elle sera accompagnée d’une groupe basique + un violoniste et de la danseuse étoile Marie-Agnes Gillot (je reviendrai sur le pourquoi, plus tard**).
2 ans donc, que j’attendais de la revoir, 2 ans qu’elle s’était assise à mes côtés en posant sa main sur mon épaule, en regardant la petite salle du New Morning se remplir. Il peut s’en passer des choses en 2 ans, et pour Marianne, ça sera la sortie d’un nouvel album puis une immobilisation en corset suite à une chute sur les fesses… La date de ce concert était initialement prévue en avril 2015, mais le public fidèle, a su rester patient et attendre la reprogrammation le 7 octobre 2015.
20h45, la salle se lève à l’arrivée de Marianne, affaiblie. Elle se déplace à l’aide d’une canne, et devra s’asseoir à plusieurs reprises entre les chansons. Mais son humour est toujours intacte, sa voix également (enfin, quand on connait sa voix dans les années 60-70, dire que sa voix est intacte n’est pas une vérité, mais vous m’aurez comprise).
La soirée fêtant ses 50 ans de carrière, allait retracer les plus anciens aux plus récents titres. La setlist avait un axe assez sombre dans le choix des chansons, avec une grande mélancolie renforcée par les superbes réinterprétations au violon.
Elle ouvra avec Give My Love To London, seul titre que je filmerais de la soirée, j’ai voulu profiter, car je ne sais pas si je la reverrai un jour sur scène. Ce titre titre est également celui qui ouvre son dernier album, du même nom :
Marianne interprétera à merveille et plein d’émotions, la suite de la setlist, en pestant de temps en temps « Rah, encore un titre à se pendre, je suis désolée » « Ah non, en voici une plus joyeuse, ah non shit, ça parle d’une droguée, mais je la chante bien vous verrez ». Elle nous parlera également de Keith et Mick, de Nick Cave et d’anecdotes concernant les périodes liées aux chansons, et surtout, dans quel état d’esprit les a-t-elle composées.
Souvent, elle prendra place dans son fauteuil Voltaire, à prendre un thé et à observer la foule. Elle n’allumera pas une seule cigarette…Mauvais signe, elle qui le fait même si c’est totalement interdit. Elle mettra de temps en temps ses lunettes pour lire sur le pupitre, et se moquera d’elle-même.

La soirée sera ponctuée par plusieurs grands moments, à savoir la danse de Marie-Agnes Gillot sur Love More Or Less, la version incroyable de Ballad Of Lucy Jordan au violon, la version rallongée de Sparrows will sing (écrite par Roger Waters sur le dernier album de Marianne), le passage de Deep Water qui m’a fait couler quelques larmes mais surtout, LE MOMENT où tout le monde a pu chialer : le retour de Marianne sur scène après une standing ovation : après la dernière chanson, tout le Trianon s’est levé et a applaudi pendant environ 10 minutes, et Marianne, aidée d’un assistant, est revenue, et a chanté A Cappella. C’était magnifique.

Même si elle dira plus tôt dans la soirée qu’elle n’est pas une Reine car elle aime le Whisky et la Vodka, ce soir, malgré sa canne, malgré son visage changé, elle était une fois de plus, une véritable Reine. Je l’ai sentie très affaiblie par rapport aux autres prestations, et si vous avez l’opportunité de la voir, allez-y, car je ne sais pas combien de temps elle pourra encore se tenir face à nous, avec une telle prestance. Merci en tout cas pour ces 1h30, j’en suis sortie vraiment émue, Marianne m’émeut à chaque fois mais cette fois-ci, il y avait un pincement au cœur du fait de l’avoir vue si différente en peu de temps.
Seul regret : ne pas avoir eu Sister Morphine.
Je ne peux que vous conseiller d’écouter sa merveilleuse discographie (Broken English, Before The Poison, Vagabond Ways, Strange Weather..), et de foncer sur son dernier album Give My Love To London, une pure merveille ! Je vous mets d’ailleurs Sparrows Will Sing ci-dessous :
==> Galerie Photo <==
Setlist :
Give My Love to London
Broken English
The Stations
Love More or Less
Vagabond Ways
As Tears Go By
It’s All Over Now, Baby Blue
Wilder Shores of Love
Late Victorian Holocaust
Deep Water
Sparrows Will Sing
The Ballad of Lucy Jordan
Love is teasing (a cappella)
* histoire de la chaussette : Marianne, alors avec Mick Jagger qui la trompait souvent, a eu une petite histoire avec Keith Richards, qui racontera dans sa biographie :
Qui va à la chasse perd sa place non ? En fait, il a fallu que je décampe en catastrophe, quand Mick est revenu. Notre seule fois ensemble. Très physique, très chaud. On était en plein dans « les dernières lueurs », comme Mick le dit dans « Let Me Down Slow », ma tête bien calée entre ces deux magnifiques nichons, et brusquement on entend sa voiture arriver. J’ai filé dans le jardin par la fenêtre après avoir attrapé mes grolles, quand je me suis aperçu que j’avais oublié mes chaussettes ! On en plaisante encore là dessus, Marianne et moi. Elle m’envoie des messages du style « Toujours pas retrouvé tes chaussettes ! »
** Marie-Agnès Gillot (danseuse étoile) et Marianne Faithfull ne se quittent plus depuis plusieurs années, parait-il qu’elles ont un lien mère-fille. Quelques photos ont mis en scène leur histoire d’amitié que je trouve sublimes :