Elle a beau être totalement décalée, l’iconique Catherine a électrisé la salle
Qui ne connaît pas ne serait-ce qu’un air des Rita Mitsouko ? Le duo rock phare des années 80, popularisé en 85 grâce à leur Marcia Baila, est devenu sans conteste l’OVNI du paysage musical Français. Mêlant tous les courants à la fois rock, funk, jazz, électro, les Rita ont trôné dans les charts pendant plus de 20 ans, menés par deux énergumènes à la fois farfelus et attachants. Couple à la ville comme à la scène, seule la mort de Fred Chichin en novembre 2007 à l’âge de 53 ans mettra un terme à leur carrière. Catherine Ringer assurera seule la fin de la tournée, sur scène, avant de voguer vers une seconde Cool Frénésie, à savoir, une carrière solo.
C’est donc avec Ring N Roll en 2011 que Catherine renaît, puis avec Chroniques et Fantaisies dix plus tard. Entre temps, le public aura l’occasion de découvrir deux de ses trois enfants sur scène, avec le groupe Minuit, porté par Simone Ringer au chant et Raoul Chichin à la guitare. Ce dernier a d’ailleurs participé à l’enregistrement de Chroniques et Fantaisies.

Pour cet album, Catherine à la fois écrit et composé la totalité des douze titres, avec, en plus de sa voix, mis en avant ses talents de bassiste, pianiste, guitariste et flûtiste. Et comme Catherine n’en a jamais assez, elle est partie en tournée et a posé ses petites valises à Tours, Au Temps Machine.
L’événement a rapidement affiché complet avec 600 rapides et privilégiés aficionados, sans grande promotion (on ne peut pas dire que Catherine occupe les réseaux sociaux…). Le public est varié, allant de 20 à 60 ans, âge de l’artiste qui se dit pourtant Senior.
Pas de première partie, on entre directement dans l’ambiance à 20h45 ! Catherine Ringer est précédée de ses 4 musiciens Nicolas Lienard au clavier, Paul Pavillon à la guitare, Franck Amand à la batterie et Noel Assolo à la basse, avant d’entamer son nouveau single Senior. Habillée d’une combi rouge sang, d’un foulard, d’une longue tresse et maquillée de noir, elle exalte la foule rien qu’à sa présence. Se mimant au guidon d’une moto , elle nous dit « très heureuse d’être ici à Tours, je vais vous chanter des nouvelles chansons mais aussi des anciennes, voire très anciennes. On commence avec une chanson écrite lors d’un retour du Maroc avec Fred, sur notre moto, Fier-à-bras », avant d’imiter le vrombissement des pots d’échappement et de nous emmener avec elle sur ce fou road-trip partant d’Essaouira à Paris, en passant par le péage St Arnoult (bien connu des Tourangeaux qui sauront sourire à ce moment) sur un fond de riffs rock bluesy répétitifs. La salle danse, rit, applaudit et n’a d’yeux que pour cette femme qui, il faut le dire, ne semble pas seule dans sa tête. Quel boute-en-train ! Petite de taille mais si grande intérieurement. Son visage fait partie à part entière de son jeu de scène. Certes, sa voix est absolument grandiose avec un micro placé à 2 mètres de ses lèvres, mais son attitude scénique est indissociable. Paupière surélevée, air blasé, désinvolte, malicieux, danse saccadée, elle observe la foule puis part dans le vide à la recherche d’âmes qu’elle seule peut atteindre. Je suis toujours fascinée par les statures d’artistes et ce qu’elles dégagent, autrement dit, la prestance. Certain(e)s sont lisses bien que la prestation soit correcte, et d’autres arrivent au premier souffle à allumer la petite étincelle. Catherine fait partie du patrimoine en quelque sorte et se retrouver face à elle dans une si petite salle lui donne un bien bel avantage.

Les versions sont toutes ré-orchestrées de façon bien plus pêchues, c’est une sacrée claque auditive, tous les styles y passent, de la java au rock en passant par l’électro et le jazz ! Je pense entre autre à l’excellent Live In Las Vegas, ma préférée des Rita Mitsouko, en duo à l’époque avec les Sparks, qui a enfin une version à la hauteur de son potentiel. Idem pour l’excellente Punk103 qui prend toute sa fougue et hargne grâce à un accompagnement électro surpuissant et une voix théâtrale collant au sens du texte, le tout chorégraphié d’un salut militaire. Punk103 marquera d’ailleurs les esprits et laissera le public assommé. Autre grand moment, mais plus émouvant (et certainement le plus éprouvant pour la chanteuse), pendant Tristessa, poème mis en musique en hommage à Fred Chichin. Catherine le chantera voilée d’un drap noire lui cachant le visage, avant de l’enlever et de reproduire les derniers gestes d’un vivant face à un corps inanimé, à savoir croiser les bras sur le torse, fermer les paupières et la bouche. L’enchaînement avec le titre suivant fut plus long que pour les autres…
Cat’ (c’est plus rapide) ne choisira pas les plus attendues des Rita (C’est comme ça, les histoires d’A, Alors c’est quoi ?…), et laissera la part belle à la période des duos avec le groupe Américain The Sparks, jusqu’à reprendre leur titre When I’m With You. Bien évidemment, l’impasse Marcia Baïla n’est pas envisageable et elle sera interprétée avant le rappel. Ce dernier d’ailleurs sera comblé par les ouh-ouh ouh-ouh, bonne alternative aux simples applaudissements. Cat’ reviendra pour deux titres, notamment avec Les Bohémiens qu’elle avait enregistré pour le film Liberté de Tony Gatlif, et Andy sublimé par un long slap de basse et solo de guitare. Après 1h30, la salle est au firmament et le groupe rincé.

Les échanges avec le public sont présents, toujours dans le plus grand des respects voire retenues, mais aussi dans le second degré, à l’image d’un fan hurlant « t’es la meilleure Catherine » repris par un « I Know I’m the Best » par Catherine, affalée sur son pied de micro. Elle semble heureuse et surprise d’un tel accueil, ne mesurant pas l’impact que sa musique a pu et peut avoir dans le fin fond des chaumières. Les Rita ont marqué leur époque avec leurs multiples facettes à contre-courant, et Catherine réussit le pari de faire perdurer l’héritage Mitsouko, tout en se renouvelant à la sauce Ringer. La setlist est bien équilibrée et l’énergie qui s’en dégage est tout simplement rayonnante.
Comment vous expliquer la cure de jouvence que nous a offert Catherine Ringer ?! On peut juste dire une chose en sortant « whaou, c’était dantesque ! ». Elle incarne la folie, la prestance, le respect et la musicalité, le tout dans un concentré scénique unique qui lui appartient. Avoir attendu 10 ans pour revenir, ne retentez jamais ça Dame Cat’ car il y a encore de sacrés bons moments à passer avec vous dans les salles de concerts.

Ruez vous sur les dernier billets encore disponibles pour le reste de sa tournée, plusieurs dates sont complètes.
Setlist
- Senior
- Fier à Bras
- Como Va
- Vive l’amour
- Mandolino City (Les Rita Mitsouko)
- Tristessa
- Don’t Forget the Nite (Les Rita Mitsouko)
- Grande Lessive
- Punk 103
- Petite Planète
- Ce Sale Ton (Les Rita Mitsouko)
- Singing in the Shower (Les Rita Mitsouko)
- Live in Las Vegas (Les Rita Mitsouko / Sparks)
- When I’m With You (Sparks cover)
- Allô! (Les Rita Mitsouko)
- Marcia Baïla (Les Rita Mitsouko)
- Les Bohémiens
- Andy (Les Rita Mitsouko)
