Carnets de voyage au Japon : épisode 1/6
Premier épisode du périple au Japon au mois d’aout (archipel composé 6852 îles…Je me suis contentée d’arpenter en majorité, la principale, Honshu), où j’ai pu visiter les villes/îles suivantes :
- Tokyo
- Kyoto
- Mont Fuji
- Naoshima
- Hiroshima
- Miyajima

Les carnets de voyages seront rédigés dans l’ordre du voyage, et j’espère, vous donneront envie d’aller visiter cette merveille du monde.
Arrivée à l’Aéroport d’Haneda vers 12h, après 15h de vol et un décalage horaire de 7h (de +), la nuit avait été très courte. Je ne m’étalerai pas de suite sur mon arrivée à Tokyo car elle sera développée dans l’épisode dédié à cette dernière. Quoiqu’il en soit, mon objectif principal lors de ce voyage, était de monter en haut du Mont Fuji et d’assister au lever du soleil. Bah oui, désigné comme le Pays du soleil levant, il fallait l’honorer.

La majorité des guides que j’ai lus parlaient de la montée comme d’une randonnée d’environ 5h, sans grande difficulté… Je pense qu’on ne parle pas du même Mont Fuji, ou du même sommet ! Qu’importe, à l’époque, je ne le savais pas encore car en revenant, j’ai relu mes guides et je me suis en effet plantée dans l’interprétation : ces derniers parlaient de la randonnée qui menait à la 5e station, là où la plupart des gens s’arrêtent pour prendre une photo, mais pas du tout du sommet !

Pour info : je vous conseille 2 articles qui confirment que je ne suis pas folle sur ce que je vais vous raconter, l’un s’intitule « sur les marches de l’enfer » et l’autre « l’enfer de l’ascension »
Nous sommes donc le lendemain de mon arrivée à Tokyo. Depuis 2 semaines, je ne cesse de visualiser ce site très précis de la météo du Mont Fuji (avec les prévisions à différentes altitudes, je vous le conseille !) et de ne voir que de la pluie et des orages. L’ascension n’est ouverte qu’en juillet-août et début septembre, hélas, en cette période, il est rare (même en dehors me direz vous) d’avoir du grand soleil. 48h avant mon arrivée, une fenêtre semblait tenir le coup, qui plus est, le lendemain de mon arrivée. J’aurais été extrêmement malheureuse de ne pas le monter, c’était tout de même mon rêve depuis un moment, alors fonçons !
De Tokyo, il faut compter 2h30 de bus (et c’est vraiment le moyen le plus simple d’y aller). Le départ se fait de la gare Shinjuku et vous dépose à la 5e station. Vous devez réserver votre bus sur le site suivant

A partir de la 5e station, quatre chemins s’offrent à vous : Kawaguchiko (ou Yoshida), Subashiri, Gotenba et Fujinomiya. J’ai choisi de prendre le Yoshida pour 2 raisons : c’est le chemin ancestral emprunté depuis la nuit des temps, et surtout c’est un chemin qui permet de voir le lever du soleil tout au long de l’ascension si jamais on n’arrive pas à temps au sommet.
Pour info : la première ascension a été réalisée en 663 par un moine Bouddhiste.
Pour info : désolée si je vous choque avec cette remarque, mais je l’ai monté en ayant mes règles (ce qui n’aide en rien) et que la religion Shintoïste et Bouddhiste interdisaient aux femmes l’accessibilité à tous les lieux saints, notamment le Mont Fuji, de part son côté sacré, du fait qu’elles avaient leur règle (car considérées comme impures. En effet, ces deux religions ont beaucoup d’interdits vis à vis de ce qui se rapporte au sang). Il faudra attendre 1872 pour que cette interdiction soit levée.
Pour info : le Mont Fuji est un volcan, encore considéré comme « en activité », qui culmine à 3776 m. Il est le point le plus haut du Japon.

Pour résumer, voici le timing de mon ascension, en sachant que je n’ai fait AUCUNE pause en refuge (et par chance, je n’ai pas eu le fameux mal des montagnes).
- Arrivée à la 5e station : 20h30
- Départ : 21h15
- Arrivée au sommet : 2h40
- Lever du soleil : 4h
- Départ du sommet : 9h
- Arrivée en bas : 14h

Avant de partir, arrêtez vous dans l’une des 2 boutiques ouvertes à la 5e station, afin de prendre un « totem » en bois (2 tailles différentes, pensez simplement à votre retour en avion…). Sur ces totems, vous pourrez, pour 300 yens et à chaque refuge, vous le faire tamponner au fer et ainsi garder un superbe souvenir. Pour ma part, j’ai pris le petit modèle, je n’ai donc pas pu le faire tamponner à tous les refuges, j’ai privilégié les 2 derniers, ainsi que le sommet.

Sur mes 5h30 de montée, disons qu’un tiers a été easy, et les 2 autres n’ont été que surpassement de soi, tant face à la pente abrupte, qu’aux rochers à escalader, et qu’aux températures en chute libre. Par chance, la météo était exacte, au dessus de moi, un ciel étoilé tout simplement magique. Des étoiles filantes, et des étoiles éclatantes. Pas un nuage, le silence rompu de temps en temps par les clochettes des totems, et pour seule lumière, ma lampe frontale (en dehors des arrivées aux refuges). Beaucoup d’ailleurs réservent une nuit en refuge ou quelques heures, afin de couper l’ascension. Vous pourrez simplement vous y arrêter pour pisser, manger chaud, boire ou vous asseoir. Chaque refuge a sa petite cheminée (un trou d’environ 50 cm au dessus duquel sèchent les vêtements des dingues comme moi qui montent cette montagne sacrée) et il y en a environ 14 entre la 5e station et le sommet.
J’ai bien évidemment croisé des grimpeurs, difficile d’être seule, mais de nuit, l’ambiance est tout autre, et la foule pas au rendez-vous. Les conditions sont nettement moins clémentes de nuit !

Cette petite escapade vous demandera une certaine petite forme physique (ou alors vous ferez l’ascension en 2X plus de temps, mais peu importe, le principal est d’arriver en haut) car il faudra grimper sans cesse sur une violente pente, avec des roches glissantes, parfois plus haute que ma hauteur de hanche. Des passages étriqués vous demanderont de balancer votre sac à dos devant vous pour réussir à passer, et à aucun moment la montagne ne vous laissera de répits. N’essayez pas de sortir du circuit « balisé », surtout de nuit. Les 2 dernières heures sont les plus éprouvantes car l’ascension n’en finit pas et que la route devient de plus en plus difficile et que les températures diminuent à vue d’œil (par chance encore, je n’aurai pas de vent). La dernière 1/2 heure ne sera qu’une succession d’escaliers, plus ou moins hauts, plus ou moins rapprochés. Le souffle se fera court et le cœur s’accélérera à une vitesse folle. Vous serez en sueur, trempé(e) et grelottant, gardez simplement en tête l’objectif et rien d’autre. J’ai doublé une femme en pleurs disant qu’elle n’y arriverait jamais, j’ai croisé un homme transi par la douleur, ou encore un couple à bout de souffle souhaitant faire demi-tour, mais ne l’envisagez même pas, faire demi-tour est impossible de ce côté du versant.

Vers 2h du matin, j’ai aperçu au loin 2 lions triomphants en granite de chaque côté d’un Tori, annonçant l’entrée dans un lieu sacré. Putain ça y est ? Après plus de 5h, j’approche du but. Encore une bonne série de roches, de cordes, et d’escaliers à passer mais mon cerveau ne réfléchit plus, il veut juste le sommet avant que le soleil ne se lève. Il est 2h20, on est une petite dizaine à se féliciter et conscients de ce qu’on vient de réaliser (ou peut être pas si conscients). Autour de moi, des personnes parties depuis 17h !! Et puis les nerfs lâchent et j’ai une petite crise de larmes (douleur, fatigue, satisfaction, réalisation d’un rêve)…mais très vite, la réalité me rattrape. Les températures sont négatives. Je suis glacée, je n’ai jamais connu un tel froid, je suis à la limite de l’endormissement, seuls les nerfs me tiennent (et une amie au téléphone, la pauvre elle était pépouze dans son canapé face à Billy !). La seule solution, retirer toutes mes fringues et les changer. On prend son souffle, et on retire tout, même le soutien-gorge, un mal pour un bien. Concernant le bas, je ne changerai que mes chaussettes (montantes) et je m’enroule dans ma couverture de survie (purée, dingue comme ce truc fonctionne) mais malgré ça, je claque des dents. Je me place face à l’horizon, personne devant moi, et je regarde au loin toutes ces petites lampes frontales monter, monter, monter…et je ne sens plus mon corps.

A 3h30, le temple dans mon dos ouvre ses portes et le gong retenti, le soleil commence, lui aussi, son ascension. A 4h15, le spectacle qui s’offre à moi est tout simplement incroyable. Je surplombe les nuages, je suis au paradis. Les premiers rayons du soleil me réchauffent et autour de moi, les grimpeurs sortent leur trépieds pour immortaliser ce moment. Je suis en train de vivre le célèbre Sunrise du Mont Fuji, rêve de beaucoup, et en tout cas de tous les Japonais. Vivre le lever du soleil, au dessus d’une mer de nuages est assez rare. Durant 1h30 le silence est roi, et le soleil continue son ascension pour nous baigner entièrement de ses rayons aux alentours de 5h30. Une nouvelle vie commence : le temple s’agite, le restaurant du refuge ouvre et l’odeur de soupe et de nouilles au soja me réconfortent. Je ferai tamponner fièrement mon totem !

Ensuite, il y a la balade autour du cratère (compter 1h30), avant de se décider à redescendre. Il est 9h, le déchirement présent, de laisser ce volcan sacré qui m’a demandé beaucoup, que ce soit physiquement et mentalement. La brume est apparue et la pluie s’est invitée à ma descente…La météo avait dit vraie, une seule petite fenêtre disponible pour faire cette ascension.

La descente est un autre enfer ! Vous visitez un autre pan de la montagne, entièrement nu, sans refuge, ne laissant qu’un dédale de pierres de lave et de sable. Attention aux chutes, et merci les bâtons de marche. Les genoux souffrent, les bras qui forcent sur les bâtons également, la montagne n’avait donc pas dit son dernier mot. Je me rappellerai toutefois de cette soupe de nouilles et bière après 20 minutes de descente (seul refuge accessible) !
5h30 de montée, 5h de descente, 5h au sommet, autant vous dire qu’à mon retour à Tokyo vers 18h, je suis partie me coucher ! Mais l’esprit léger. Je l’avais fait, et dans des conditions exceptionnelles. Je suis vraiment fière de moi et heureuse de pouvoir le dire ! Le voyage pouvait commencer.

Je ne veux pas vous « dégoûter » de tenter l’ascension, si je l’ai fait, c’est que vous pouvez le faire (avec un bon mental). Je tiens simplement à vous prévenir que si vous êtes sportif, ce ne sera pas forcément une balade de plaisir mais vous pourrez le faire entre 4h et 6h, et que si vous êtes moins téméraires à trainer en chaussons les dimanches le cul dans le canapé, n’hésitez pas à commencer l’ascension dans l’après-midi et à vous arrêter en refuge à plusieurs reprises. Si jamais vous avez la tête qui tourne ou le souffle très court dû à l’altitude, redescendez très vite, sinon vous vomirez les jours suivants et pourrez tomber en syncope durant la montée.

Le proverbe dit : Sage est celui qui le montera une fois, fou celui qui recommencera. Je suis donc sage, pas folle. N’oubliez pas que le Mont Fuji est une montagne, et qu’en montagne, le temps peut changer à toute vitesse, ne prenez pas cette « randonnée » à la légère. Vous pouvez également vous aider des services d’un guide durant l’ascension (souvent, guide pour un groupe d’environ 10 personnes).
Equipement indispensable :
- bâtons de marche
- chaussures de rando
- sac à dos
- nourriture (barres céréales, bananes, sushis en kit)
- 3 t-shirts (à changer selon votre état de sueur, en garder un pour le sommet, et un pour l’arrivée le lendemain)
- 2 sous pull
- 1 pull
- 1 veste contre le froid (type ski mais peu volumineuse)
- gants
- cagoule, écharpe
- chaussettes hautes
- couverture de survie
- lampe frontale (et piles de rechange, sait-on jamais)
- eau (j’avais 3 litres, il en aurait fallu 4, mais à vous de juger le poids du sac à dos)
- un sac poubelle (pour vos déchets)
- des yens (pour payer les toilettes, les tampons etc)
- un pocket wifi (pour appeler des connaissances là-haut, ou les secours)
==> Galerie Photo <==

Retrouvez les autres épisodes :
5 commentaires Ajouter un commentaire